J'ai toujours cru inadmissible la restriction que cher-
chent à imposer à la neige ceux qui se chargent de por-
ter au monde sa parole
Parce que je sais que le cri de ce sel c'est le talisman
de la montagne
Et qu'un jour l'homme s'épanouira pour devenir
l'intelligence de la terre
Oui même l'homme avec ses cataractes c'est-à-dire
celui qui se soucie si peu des nébuleuses dont les franges
bouchent encore les barbacanes nuageuses du monde.
Et du soleil pour la dernière fois peut-être vaticinant
sur le verre étamé de son tripode maritime
Rien ne me paraît plus admirable que cette gravure
toute brune représentant plusieurs jeunes filles flottant
les pieds nus dans un espace splendide au centre de la
terre
Depuis je perçois au ciel les anges
Ils ne sont que de vastes vers avec dans l'éprouvette
de leurs ventres des boules d'azur
Ils ne sont que des tubes translucides qui ondaient
en se lovant par pointes et phalanges
Et autour d'Aldébaran les goules ces sacs rouges pal-
pitent lentement autour de leurs sept cœurs pareils à
des cadrans tachés de rouille
Mais entre toutes ces étoiles
Le vaste vampire blanc qui flotte sur l'Atlantique
pour boire l'eau de la mer et la projeter dans l'espace
se suspend aux ailes de l'équation sous les mêmes aus-
pices que ces deux Peaux-Rouges aux visages d'obsi-
dienne aux paupières rongées par les climats qui se
tiennent au bord du désert pour contempler les phan-
tasmes du néant
Parce que je sais que toujours le verre brûlant gran-
dit dans son repaire de montagnes
Mais bien que je sois souvent tenté au milieu des jar-
dins suspendus de Babylone
Réunis comme en un souffle d'extase par le reflet
sournois et amer de l'agate
Qui s'éloigne sans cesse entre les mains des femmes
Bien que je sois souvent tenté donc d'éteindre les
rires de ce monde parmi les hippocampes délicieux à
fleur d'eau se révélant dans les cercles concentriques
de la belle-de-jour (volubilis imaginaire enroulé avec
grâce autour d'un poignet si net)
Bien que parfois le grand personnage innommable
signe des étoiles noires et sceau inamovible du lacéra-
teur bufaniforme promette de relâcher son contrôle et
de permettre à quiconque de justifier le diadème aux
pierreries d'encre par lequel il s'est imposé aux ven-
deurs d'andmoine
Préposés aux portes des palais en jaquettes pivert
Je laisserai couler par le sablier de verre la buée qui
se ramasse si souvent aux vitres de ces villes
D'ailleurs l'argus à queue de nacre plane au-dessus
des nélombos
Ses pattes flétries sous les coups répétés de leur par-
fum
Qui sait je pense qu'il est parent du soleil
Puisqu'il s'échappe si facilement des nasses où
terre le dernier narval sélénite parmi toutes les no
tules vigilantes la tête en bas l'aile gauche déjà à moidé
dépliée
Pour éparpiller ainsi qu'un arrosoir magnétique sur
le gazon le museau spectral du mandrill
Et c'est ainsi dit-on
Que fleurit le pied-de-loup dont la poudre sait si bi
simuler l'éclair