Il s'est éloigné des villages. Vers le soir il a atteint le
désert, il s'y est enfoncé. Il s'est livré au mutisme de l'es-
pace. Il n'a guère dormi. Les constellations tournaient
lentes. Puis toutes les veilleuses du ciel se sont éteintes
dans la pâleur de l'aube.
Adossé à une pierre froide il a regardé naître la
lumière. Il a senti monter une tiédeur, puis sourde-
ment la fièvre. Ne pas manger.
La chaleur qui gagne. Les yeux offensés par l'éclat
du jour. Il faut des creux d'ombre pour survivre, et
changer de place suivant l'heure.
Jusqu'à ce que le soleil se fiche vibrant comme une
flèche dans le zénith. L'azur blessé à mort. Le chaos du
sol prêt à tomber dans le puits d'en haut et l'âme dans
l'inconscience.
Que d'instants à l'attache. Mais rien de changeant
comme eux. Le scorpion sous la roche. Un souffle avec
ses pieds de poussière ou une lapidation de sable.
Et le soleil lassé lui-même. Désarmée de rayons sa
braise encore en suspens, puis tombée d'un coup.
Alors la nuit de nouveau avec sa froidure sous un ciel
de pierreries tremblantes et le sillage des météorites.
L'insomnie jusqu'au petit matin, jusqu'à l'abîme
d'un sommeil sans rêve et ne revenir à soi qu'au plein
jour.
Devant moi l'étendue de l'avenir. Derrière moi
infranchissables les parois du passé. Fermer les yeux.
T'attendre.
Le silence. Ou presque. Ton pas est pourtant léger.