Au fond je n'ai pas de message — rien de sublime
Je parle avec la voix d'un dieu quoddien
que nous reconstruisons ensemble ;
je suis l'ami des regards ensoleillés mais aussi de vos
yeux de brume ;
je change selon le vent que rien jamais ne désoriente
Celui qui ne me reconnaîtra pas
aura pris la place de mon cœur...
Dans les siècles lointains si
comme Baudelaire, un jour je venais
à me mirer au bord du fleuve d'avenir
J'aimerais que l'on n'oubliât pas
le monde en lequel j'ai vécu :
un monde dont les villes
n'étaient encore qu'étoiles aux carrefours
où l'on s'interrogeait de l'udlité
de la métaphysique ;
Un monde d'électronique fabuleuse et de pétrochimie
quand le soleil en casque jaune d'ouvrier
grimpe aux poutrelles des raffineries
On y écoutait des chansons bêtes comme c'est pas pos-
sible
et on trouvait dans ce boucan
assez d'énergie pour danser,
(ça couvrait le bruit des bombardiers qui sur nos têtes
remplissent leurs réservoirs en plein vol
— abeilles interdites de ruche !)
Un monde minuscule entouré par les électrons
des satellites météorologiques
parcouru d'ondes hertziennes où l'on voit des gens
s'embrasser sur fond d'hollywood
Un monde où l'on buvait le matin amer et noir
dans un bol de café lyophilisé ;
et le soir ambre dans les bars bien frappé avec des gla-
çons
multipliés par les miroirs aux lumières cadavériques.
Un monde où le sommeil s'avance léger ange imma-
culé
dans sa chlamyde d'oubli
et neige doucement
sur un joli village de silence rouge.